Interview – Original in French

Antoine Abou Samra en plein vagabondage culinaire

Publié le 28 février 2020 par M.R.

Après un long parcours en entreprise, cet ancien de l’Insead a fondé A Table for Two, une start-up dédiée à la gastronomie. 

Dans les jardins de L’Appartement, ils sont une vingtaine de curieux à être venus à l’invitation de A Table for Two, la jeune start-up du non moins trépignant Antoine Abou Samra. Ce soir, l’ancien patron de Bader Young Entrepreneur Program y reçoit Rita Khoury, la directrice commerciale d’Adyar, le domaine vinicole fondé au début des années 2000 par l’ordre des moines maronites.

Ce n’est pas la première fois que le quarantenaire accueille un as de la gastronomie en ce lieu un rien excentré. Il y a quelques semaines, c’était les fondateurs de Château Qanafar qui se prêtaient à l’exercice.

Dans quelques semaines, cela pourrait être un chef français installé à Beyrouth depuis plusieurs années.

À chaque fois, le concept est le même : il s’agit d’aller à la rencontre d’hommes et de femmes attachés à leur terre et aux produits dont ils parlent avec simplicité et passion. Et, bien sûr, de déguster avec délectation les fruits de leur labeur. «Si on comprend leur parcours, on comprend mieux leurs produits, résume Antoine Abou-Samra. Moi je me demande si un jour on pourra reconnaître un vin libanais comme on devine un vin français ou italien. Pas vous?»

L’événement est filmé, un podcast est même réalisé pour en assurer la pérennité sur les réseaux sociaux. «Ces rendez-vous à L’Appartement me permettent de tester le concept», avance-t-il.

Antoine Abou-Samra ne fait pas son beurre de ces rencontres gourmandes, d’autant que, crise oblige, les Libanais n’ont guère le porte-monnaie à la fête. «Lorsque j’ai construit mon business-plan, il était beaucoup plus ambitieux. Je voulais créer une agence d’événementiels spécialiste de la gastronomie : j’envisageais d’organiser des dîners dans des lieux insolites ou de prestige ; des émissions de télévision pour aller à la rencontre de chefs, des rencontres avec des producteurs… La crise m’a obligé à réduire la voilure. Aujourd’hui, je couvre juste mes frais.»

À défaut de lisibilité quant au marché libanais, l’entrepreneur démarche déjà les marchés du Golfe. «La régionalisation était de toutes les façons inévitable. Le Liban est un marché trop petit.»

Avec dans sa ligne de mire : l’Arabie saoudite où “l’ouverture culturelle” a permis à nombre d’initiatives de voir le jour, notamment gastronomiques. Cet ancien de l’Insead ne veut pas en démordre. Malgré le contexte économique, «A Table for Two doit marcher».

S’il s’acharne, c’est qu’il voit dans sa jeune pousse l’aboutissement d’une carrière déjà bien remplie. «En chemin, je me suis peut-être un peu perdu», s’amuse-t-il. Comme si les différents emplois qu’il avait assumés, les entreprises qu’ils avaient créées ou dirigées l’avaient mené jusqu’à ces rivages culinaires.

«La vocation, c’est d’avoir pour métier sa passion», disait Stendhal. «Je n’ai pas forcément besoin de passion, mais j’ai besoin de sens. Mon métier doit m’épanouir.»

On ne sera donc pas surpris d’apprendre qu’il a largué il y a un an son poste de PDG d’une PME d’une centaine de salariés pour fonder son propre projet. «Le corporate, ce n’est pas moi. Je veux pouvoir faire quelque chose qui me plaît. C’est fondamentalement gratifiant.» Difficile de dire le contraire, surtout quand on sirote un verre de vin.

Interview – English Translation

Antoine Abou Samra on a culinary journey

Posted on February 28, 2020 by M.R.

After a long career in business, this INSEAD MBA graduate founded A Table for Two, a start-up dedicated to gastronomy.

In the gardens of L’Appartement, about twenty curious people came at the invitation of A Table for Two, the young start-up by the joyful Antoine Abou Samra. Tonight, the former boss of the Bader Young Entrepreneur Program welcomes Rita Khoury, the commercial director of Adyar, the winery founded in the early 2000s by the order of the Maronite monks.

This is not the first time that the 40-year-old has welcomed a gastronomic ace to this somewhat eccentric place. A few weeks ago, it was the founders of Chateau Qanafar who lent themselves to the exercise.

In a few weeks, it could be a French chef who has been living in Beirut for several years.

Each time, the concept is the same: it is about meeting men and women attached to their land and to the products they talk about with simplicity and passion. And, of course, to taste with relish the fruits of their labor. “If we understand their background, we better understand their products,” sums up Antoine Abou-Samra. I wonder if one day we will be able to recognize a Lebanese wine as we guess a French or Italian wine. Not you?”

The event is filmed, a podcast is even produced to ensure its sustainability on social networks. “These meetings at L’Appartement allow me to test the concept,” he says.

Antoine Abou-Samra does not get enough of these gourmet encounters, especially as, due to the crisis, the Lebanese hardly have a wallet at the party. “When I built my business plan, it was much more ambitious. I wanted to create an events agency specializing in gastronomy: I was considering organizing dinners in unusual or prestigious places; TV shows to meet chefs, meetings with producers … The crisis has forced me to downsize. Today, I’m just covering my costs.”

In the absence of clarity regarding the Lebanese market, the entrepreneur is already approaching the Gulf markets. “Regionalization was inevitable anyway. Lebanon is too small a market.”

Within his sights: Saudi Arabia where “cultural openness” has allowed a number of initiatives to emerge, especially gastronomic ones. This former Insead does not want to back down. Despite the economic context, “A Table for Two must work”.

If he is so determined, it is because he sees his young growth as the culmination of an already busy career. “Maybe I got a little lost on the way,” he laughs. As if the various jobs he had taken on, the companies he had created or managed had brought him to these culinary shores.

“A vocation is to have one’s passion for a job,” said Stendhal. “I don’t necessarily need passion, but I need meaning. My job must make me light up. ”

We will therefore not be surprised to learn that a year ago he quit his position as CEO of an SME with a hundred employees to found his own project. “Corporate isn’t me. I want to be able to do something I like. It’s fundamentally rewarding. ” It’s hard to say otherwise, especially when sipping a glass of wine.

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